La Drépanocytose : Causes, Transmission, Symptômes et Traitements
Définition
- La Drépanocytose appelée communément en RDC anémie SS, est une anomalie héréditaire du sang, caractérisée par la présence dune hémoglobine anormale (Hb S) et par un aspect en faucille des globules rouges. Cette Hb S est la conséquence du remplacement de lacide aminé acide glutamique par la valine en position 6 de la chaine beta de lhémoglobine.
La Drépanocytose est aussi une maladie génétique à transmission autosomale récessive liée à une anomalie génétique (mutation E6V c’est-à-dire une substitution de ladénine par la Thymine) au niveau du 6ème codon du bras court du chromosome 11. Cette anomalie génétique entraine la formation de lhémoglobine anormale S ayant comme caractéristique de falciformer le globule rouge (le GR prend la forme dune faucille) en présence de certaines conditions comme lhypoxie, lacidose, la fièvre
Historique
Les études dEMMEL (1917) permettent de mettre en évidence le caractère héréditaire de cette maladie. Hahn et Gillespie (1927) ont montré que la déformation en faucilles des hématies est en rapport avec la désoxygénation de lhémoglobine et quelle était réversible dans certaines conditions.
En 1933, Diggs décrit deux tableaux cliniques différents : des enfants présentant des signes danémie sévère et leurs parents asymptomatiques, et les anomalies globulaires provoquées seulement in vitro. Il parle alors de « trait» drépanocytaire. En 1947, NEEL met en évidence le caractère héréditaire monogénique et récessif de la transmission de la drépanocytose c’est-à-dire que la transmission de la maladie suit les lois mendéliennes.
En 1949, PAULING et ITANO montrent que lhémoglobine du sicklanémique nest pas identique à celle du sujet normal. La différence la plus manifeste se situe au niveau de son comportement électrophorétique. En 1956 VERNON INGRAM montre que lhémoglobine S ne diffère de lhémoglobine A que par un acide aminé en position 6, lacide glutamique remplacé par la valine. Cest la première maladie génétique dont la structure moléculaire est connue.
En 1984, la première transplantation de la moelle chez un enfant a produit la guérison complète. Cette transplantation a été faite pour traiter une leucémie aiguë et la guérison de sa drépanocytose était un événement inattendu.
Physiopathologie
La falciformation des globules rouges est le phénomène principal à la base des signes cliniques et des complications de la drépanocytose. Les drépanocytes (globules rouges déformés) sont prématurément détruits (hémolyse) et obstruent les vaisseaux.
Dans la maladie SS, la demi-vie des érythrocytes est courte. Elle est en moyenne de 15 à 20 jours alors quelle est de 90 à 120 jours chez un individu normal. Ceci explique que leur taux dhémoglobine soit en règle de lordre de 6 à 9 g/dl. Du fait de lhyperhémolyse, il y a une production accrue de bilirubine qui entraîne un ictère et la formation de pigment biliaire.
La fonction immunitaire de la rate est altérée (asplénie fonctionnelle), favorisant chez les patients les infections par des organismes encapsulés, notamment les pneumocoques. En outre, les anomalies du complément, des immunoglobulines, de la fonction leucocytaire et de limmunité à médiation cellulaire ont été évoquées.
La séquestration des globules rouges dans la rate peut se faire sur un mode aigu (séquestration splénique aiguë) ou chronique (hypersplénisme). Latteinte de la rate suite aux infarctus répétés conduit à une microsplénie progressive et auto-splénéctomie.
Les infarctus de la moelle osseuse touchent, dans la première enfance, préférentiellement les petits os des pieds et des mains (dactylite ou syndrome pied-main). Dans la seconde enfance et au début de lâge adulte, ces infarctus touchent les régions juxta-articulaires des os longs, du rachis, du bassin (crise douloureuse) et la tête fémorale (Nécrose aseptique de la tête fémorale).
Une surinfection de la moelle nécrosée en particulier par les salmonelles est une cause fréquente dostéomyélite.
Latteinte pulmonaire, désignée sous le nom de syndrome thoracique aigu est également fréquente.
La vasculopathie cutanée explique la survenue des ulcères chroniques de jambes chez les adolescents alors que la séquestration et la vaso-occlusion dans les corps caverneux provoquent le priapisme.
La rétinopathie proliférative et les accidents vasculaires cérébraux constituent dautres complications de la maladie drépanocytaire.
La croissance et le développement pubertaire sont généralement retardés.
Manifestations cliniques
1. Les crises hématologiques
Le drépanocytaire présente généralement un tableau danémie chronique due à un raccourcissement de la durée de vie des drépanocytes. Ce tableau se manifeste cliniquement par : une pâleur conjonctivale et palmaire ; un subictère ; la splénomégalie (chez le jeune enfant) mais son volume est souvent modéré ; lhépatomégalie (surtout retrouvée chez le nourrisson et le jeune enfant) Mais dans certaines circonstances, il présente une crise danémie aigue qui peut-être : Une crise dhémolyse aigue Une crise de séquestration splénique ou hépatosplénique Ou une crise dErythroblastopénie due généralement au Parvovirus B 19
2. Les crises vaso-occlusives ou crises douloureuses
Elles sont fréquentes chez les drépanocytaires, mais elles sont très variables dans leur durée, leur intensité, leur localisation et la périodicité entre les crises. Elles peuvent être ostéo-articulaires ou viscérales. Elles sont déclenchées par les facteurs qui entrainent lhypoxie, lacidose, lhyperthermie et la déshydratation. Ces facteurs déclenchant sont : Lhumidité ou le refroidissement : courant dair, marche sous la pluie, bain à la rivière ou en piscine, climatisation excessive ; Lhypoxie : infection, acidose, haute altitude (sup. à 1500m), effort physique intense, étouffement, insuffisance respiratoire, endroit mal aéré ; La déshydratation : fièvre, diarrhée, vomissement, transpiration abondante, polyurie ; La posture immobile et prolongée, le port des vêtements, chaussures et tresse trop serrés ; Le changement brutal de climat ; La prise des excitants : alcool, tabac, drogues, ; Le stress, la fatigue, la contrariété ; La grossesse ; Certaines crises sont déclenchées sans cause apparente. La douleur peut être rapidement maximale, progressive ou brutale. Cette douleur peut se manifester par : les cris, les agitations, la prostration, les appels répétés, le repli sur soi,… Chez le nouveau né et le nourrisson, on note aussi le refus de téter, les pleurs incessants, le refus dêtre porté. La localisation de cette douleur est systémique, elle intéresse plus les os et les articulations. Elle est généralement ressentie au niveau des mains, des pieds, du rachis, des genoux, des chevilles, de la région lombosacrée, des fémurs, des coudes, de labdomen, du thorax.
3. Les infections à répétition
Elles sont en fait la première cause de morbidité et de mortalité chez les drépanocytaires, surtout avant 5 ans. La physiopathologie des infections chez les drépanocytaires sexplique de plusieurs manières. Limmunité humorale est normale mais limmunité cellulaire est légèrement déprimée. Les principaux facteurs expliquant la grande sensibilité des drépanocytaires aux infections sont lasplénie fonctionnelle, le déficit dopsonisation et la perturbation de la voie alterne du complément. Ces facteurs font que les drépanocytaires deviennent susceptibles de présenter les infections dues aux germes encapsulés comme le pneumocoque, le salmonella, lHaemophillus influenzae, le staphylocoque, le Mycoplasma, Plusieurs types dinfections sont rencontrés: les infections pulmonaires, les ostéomyélites, les arthrites, le sepsis, la méningite.
Complications
1. Complications aigues
Hormis les crises vaso-occlusives, les crises hématologiques et les infections, on distingue aussi :
Syndrome thoracique aigu (STA)
Le syndrome thoracique aigu représente chez ladulte drépanocytaire la première cause de mortalité. Linstallation de ce syndrome est souvent insidieuse chez un malade déjà hospitalisé pour une autre complication (crise vaso-occlusive osseuse, grossesse, après chirurgie, etc.). Les signes dappel pulmonaires peuvent être masqués par lintensité de la douleur de la crise, et lagitation qui parfois laccompagne. Ladministration mal évaluée ou mal surveillée de la morphine, par lhypoventilation alvéolaire quelle peut entraîner, est une cause de ce syndrome. Le syndrome thoracique aigu peut aussi sinstaller et saggraver de façon extrêmement rapide. Un échange transfusionnel doit être réalisé quand existent des signes de gravité, et éventuellement quand ce syndrome est répété. La kinésithérapie respiratoire représente une procédure simple qui a fait la preuve de son efficacité.
Priapisme et clitorisme
En cas de survenue dun priapisme prolongé, le pronostic fonctionnel est mis en jeu par un risque de fibrose des corps caverneux entraînant une impuissance. Le traitement doit donc être débuté en urgence.
Accident vasculaire cérébral
Les drépanocytaires présentant un tableau neurologique central aigu c’est-à-dire une paralysie, des convulsions, Ces patients doivent en urgence bénéficier déchanges transfusionnels et dune imagerie cérébrale (Scanner cérébral, IRM cérébral).
2. Complications chroniques La recherche de ces complications doit être systématique lorsque le patient est vu pour la première fois. Ces complications sont :
Néphropathie drépanocytaire
La néphropathie drépanocytaire est une complication fréquente et avec des conséquences graves à long terme. Il faut dépister précocement cette atteinte qui se manifeste par la présence dune microalbuminurie qui précède la protéinurie. Elle constitue une indication à un traitement par inhibiteurs de lenzyme de conversion. Lutilisation de médicaments néphrotoxiques (par exemple les AINS) et la déshydratation doivent être évités chez ces patients.
Rétinopathie drépanocytaire
Elle doit être dépistée annuellement afin de permettre un traitement préventif par laser qui met le patient à labri de séquelles fonctionnelles potentiellement lourdes. Elle se manifeste par des anomalies au niveau du fond dil.
Atteinte pulmonaire
Latteinte pulmonaire est observée chez le drépanocytaire et elle se manifeste par la survenue de la dyspnée. Elle peut se traduire par une hypertension artérielle pulmonaire, un infarcissement pulmonaire,
Atteinte cardiaque
Latteinte cardiaque est souvent due à lanémie chronique du drépanocytaire. Son dépistage doit être fait par le cardiologue.
Atteinte osseuse
Latteinte osseuse ne se résume pas seulement à lostéonécrose aseptique de la tête fémorale, humérale ou du plateau tibial. Des douleurs chroniques peuvent révéler une ostéomyélite chronique, rarement fébrile, dont le diagnostic peut rester longtemps méconnu.
Ulcères cutanés
Les ulcères cutanés sont souvent invalidants, rebelles au traitement et récidivants. Le traitement associe des mesures générales et des soins locaux.
Lithiases biliaires
Il faut systématiquement et périodiquement rechercher la présence dune maladie lithiasique biliaire, qui représente une indication de la cholécystectomie à froid.
Mode de transmission de la drépanocytose
Aux enfants AA si les deux parents sont AA, ils ne sont pas malades et ne peuvent donc transmettre lanémie SS à leurs enfants Aux enfants AS et AA si lun des parents est AS et lautre AA Aux enfants SS si les 2 parents sont AS ou SS (Cest donc un mariage à haut risque)
Ceci nous montre quil existe 3 catégories dindividus (AA, AS, SS) en rapport avec lélectrophorèse dhémoglobine
NB : Il y a une différence entre le groupe sanguin et lélectrophorèse dhémoglobine. Le groupe sanguin concerne la membrane de globule rouge (lextérieur de GR) tandis que le type dhémoglobine concerne le noyau de globule rouge (lintérieur).Le fait dêtre du groupe sanguin A, B, AB, O nexclut pas dêtre AA, AS ou SS. DIAGNOSTIC DE LA DREPANOCYTOSE Le diagnostic de la drépanocytose est à la fois clinique et biologique. Clinique : Crises vaso occlusives (douleurs des os et articulations, pleurs incessants,) Anémies à répétition (pâleur, jaunisse) Infections à répétition (fièvre)
Biologique: Test dorientation: test dEmmel ou test dItano Test de confirmation: électrophorèse dhémoglobine, iso électro focalisation IEF, chromatographie liquide à haute pression, tests moléculaires de drépanocytose.
Prévention
Elle consiste au : dépistage de la maladie qui peut se réaliser en période néonatale, pré ét scolaire, prénuptiale ou de masse, le conseil génétique pour les couples à risques et déconseiller le mariage entre sujet à risque c.à.d. entre AS x AS, AS x SS, SS x SS.
Prise en charge
Analgésiques : Des médicaments antidouleur, tels que le paracétamol ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), sont souvent utilisés pour soulager la douleur pendant les crises.
Transfusions sanguines : Les transfusions peuvent être nécessaires pour traiter l’anémie sévère ou pour gérer les complications comme le syndrome thoracique aigu. Elles aident à augmenter le nombre de globules rouges normaux dans le sang.
Hydroxyurée : Ce médicament peut réduire la fréquence des crises douloureuses et le besoin en transfusions sanguines. Il agit en augmentant la production d’hémoglobine fœtale (HbF), qui empêche les globules rouges de se déformer.
Antibiotiques : Des antibiotiques prophylactiques peuvent être prescrits pour prévenir les infections, surtout chez les enfants.
Vaccins : Les vaccinations, notamment contre la pneumonie et la méningite, sont recommandées pour réduire le risque d’infections.
Thérapies géniques : Des recherches sont en cours sur les thérapies géniques qui pourraient corriger la mutation génétique à l’origine de la drépanocytose, mais ces traitements ne sont pas encore largement disponibles.
Greffe de cellules souches : Dans certains cas, une greffe de cellules souches peut être envisagée, en particulier chez les enfants ayant une forme sévère de la maladie. Cette option est limitée par la disponibilité de donneurs compatibles et les risques associés à la procédure.
Soins de soutien : La prise en charge inclut également des soins de soutien tels que la gestion du stress, l’éducation sur la maladie et le soutien psychologique.